De la chasse : Réflexion d’un Nivernais
La chasse est un sujet qui fait débat, y compris au sein même des différentes formations politiques : on trouve dans chaque parti des chasseurs, comme des opposants à cette pratique.
Traiter ce sujet en cherchant à le dépassionner nécessite donc de l’aborder d’un point de vue pragmatique dans le but de réconcilier amoureux de la nature et chasseurs. Pas facile mais pourtant réalisable à condition de rappeler quelques réalités.
Passer son permis de chasse aujourd’hui exige travail et rigueur : le programme comprend une connaissance théorique approfondie de la faune et de ses caractéristiques, des espèces protégées, des périodes de reproduction, que peu d’écologistes urbains maitrisent.
La partie pratique est axée sur la sécurité des autres et de soi-même. A la moindre faute de sécurité, le candidat est recalé.
La nouveauté depuis 2021, c’est la formation sécurité décennale : dès lors que le permis a été obtenu il y a 10 ans, chaque chasseur doit s’acquitter d’une formation axée sur la sécurité pour pouvoir proroger son permis : c’est un gage de sérieux, parfaitement accepté par les chasseurs.
Pour ces raisons, le nombre d’accidents a chuté de 71 % comparé à 1999, environ 130 accidents par an, 7 accidents mortels en 2019 / 2020 c’est moins que la pratique du ski par exemple (47 décès en 2018).
En France, le droit de chasse est l’un des droits d’usage lié au droit de propriété.
Les chasseurs participent activement chaque année à l’entretien des chemins, élagage, débroussaillage qui restent praticables toute l’année en partie grâce à eux (une saison de chasse, dure en général 5 mois d’Octobre à Février). A ce propos il est utile de rappeler quelques réalités et règles souvent méconnues ou ignorées :
– Les trois quarts de la forêt française appartiennent à des propriétaires privés :
Se promener en forêt, c’est donc souvent se promener chez quelqu’un.
– Les chemins ne sont pas tous utilisables, seuls les chemins ruraux et les chemins communaux le sont. Se promener sur un chemin privé, traverser un pré ou un champ n’est pas permis sans l’accord du propriétaire. Pas plus que de cueillir des fleurs, ramasser des champignons, des branchages.
Dans les faits, la majorité des propriétaires privés ne s’opposent pas à la promenade sur leur propriété ni à cueillette de leurs cèpes ou girolles pourvu qu’elle s’effectue dans des proportions raisonnables, ce qui n’en fait pas un droit pour autant.
Modifier cet équilibre par des mesures électoralistes telles que celle proposée par Yannick Jadot (interdire la pratique de la chasse les week-end et vacances scolaires), c’est faire fi de cet équilibre intelligent, c’est aussi méconnaitre ou vouloir s’attaquer au droit de propriété.
Réalité Economique : Les fédérations de chasse indemnisent les dégâts occasionnés aux cultures par le grand gibier (sangliers, Cerfs, Chevreuils) : ce sont donc les chasseurs, par leur cotisation de validation annuelle du permis, qui indemnisent les agriculteurs. D’où la construction chaque année par la Préfecture d’un Plan de Chasse départemental (nombre de gibiers minimum et maximum à prélever chaque année par espèces).
Un exemple économique parlant : dans le canton de Genève, la chasse loisir est interdite depuis 1974 ; Ce sont des gardes professionnels qui sont chargés de prélever (tuer) le gibier en prolifération.
Les gardes étant peu nombreux rapportés à une population de chasseurs, il a fallu installer partout des clôtures autour des cultures, abandonner aussi la pratique de certaines cultures comme le maïs à cause des dégâts occasionnés par les sangliers.
La gestion de la faune susceptible d’occasionner des dégâts a couté en 2019 un million de francs suisses (880 000 euros) sur un canton ne comprenant que 3 000 hectares de forêt et 10 000 hectares d’agriculture.
A titre de comparaison, dans le Doubs si la situation était la même c’est 9 millions que coûterait aux contribuables la gestion de la faune chassable (avec 200 000 hectares boisés et 220 000 hectares cultivés). En prenant tous les frais directs, la gestion des animaux occasionnant des dégâts est aujourd’hui estimée à 120 000 euros grâce à l’action des chasseurs et le respect d’un plan de chasse.
En conclusion je citerai l’exemple remarquable à l’initiative de chasseurs nivernais qui assurent gratuitement l’entretien des accès et des abords d’un étang où les oiseaux migrateurs nichent à la fin de l’hiver et à la fin de l’été : ils n’y chassent pas, y ont un droit de passage pour accéder à leur territoire de chasse, et permettent ainsi aux promeneurs, observateurs ou photographes de vivre leur passion : l’exemple parfait d’une cohabitation intelligente entre deux populations amoureuses de la nature.
Pascal LEPETIT