Les beaux jours arrivants, la Nièvre observe le réveil d’un pan non négligeable de son économie : le
tourisme.
Cette ressource est très intéressante car elle permet des retombées directes assez
équitablement réparties auprès des Nivernais : déjà auprès des professionnels du tourisme, mais
aussi auprès des restaurateurs, des différents commerces, le secteur culturel et aussi les collectivités
qui bénéficient de la Taxe de Séjour.
La Nièvre dispose naturellement d’atouts touristiques majeurs : le département est idéalement situé
à mi-chemin entre Paris et Lyon, à environs 2 h 30 de chacun, tout en étant assez reculé pour
conserver un charme rural et dépaysant. La Nièvre dispose d’un Parc Naturel Régional de petite
montagne (le Morvan), comme des bords de la Loire, de canaux et de différents paysages ruraux
idylliques.
Il serait fastidieux ici de faire l’inventaire des atouts de notre région, avec ses sites, ses châteaux, ses
vignobles, sa culture, sa gastronomie, dont l’intérêt n’est plus à prouver.


Le tourisme dans la Nièvre n’est pas une nouveauté, il existe depuis quelques décennies, mais il a
évolué. Il est passé d’un tourisme régional et populaire, à une demande de plus en plus affirmée vers
un tourisme vert, attirant principalement des citadins venant goûter aux charmes naturels de notre
campagne. Autrement dit, il y a quelques décennies, on observait une cohue autour du Lac des
Settons, de touristes venant souvent des villes ouvrières de Bourgogne et alentours, pour des séjours
en camping. Simplement, depuis toutes ces années, il y a de moins en moins d’ouvriers, et pour cette
même clientèle, avec un budget similaire, on trouve des séjours équivalents sur l’ensemble du
pourtour méditerranéen. Puis les diverses réglementations sur le camping et diverses mesures
locales, venues encadrer certains excès, ont fini par détourner les estivants de ce segment
touristique. Enfin, le tournant sociétal sur les questions environnementales, le besoin de calme et de verdure, a
fait muter le tourisme nivernais vers un tourisme vert,
où des catégories socio-professionnelles plus
variées viennent se ressourcer simplement sur un transat, dans un logement individuel, idéalement
un gîte de charme, agrémentant l’observation du temps qui passe par quelques balades en natures,
sorties gastronomiques et parfois culturelles. Et surtout, beaucoup de quiétude. Bref, tout ce qu’il y a
naturellement dans la Nièvre.


Fort de ce constat, que font les élus, les collectivités pour optimiser ce potentiel ? Réponse : ils font
un peu tout et pas grand-chose à la fois.

On observe une cacophonie de mesures, parfois contradictoires, souvent très onéreuses et biaisées par un manque d’ancrage opérationnel ou une certaine vision idéologique.
On l’aura compris : Il faut miser sur un tourisme vert, tourisme de gite. Un tourisme qui met en
valeur nos paysages, nos chemins, nos vieilles pierres et les produits de notre terroir. Si un effort
politique venant des collectivités en charge des questions touristiques devait se faire, il devrait être
porté sur cette myriade d’acteurs, souvent privés.
A l’inverse, plusieurs initiatives proposées allaient à contrepied de cette tendance : les cités
Muséales, la Tour Belvédère du Haut Folin, entre autres. L’exemple du projet de mirador géant au
sommet du Haut Folin en est un exemple frappant : un coût pharaonique avoisinant le million
d’euros, la gestion confiée à une entreprise allemande, le seuil de rentabilité prévisionnel fixé à 200
000 visiteurs par an… Pour reformuler la chose, on concentre un budget démentiel sur un projet très localisé, à enjeu limité (l’objectif est de faire monter un visiteur à 50 mètres de haut au-dessus des
cimes pour observer le paysage…), avec un ticket d’entrée estimé à 10€ par personne. Le bon sens a
donné raison aux opposants au projet, l’entreprise allemande a revu le dossier plus sérieusement,
puis les scolytes (insectes ravageurs de l’épicéa) sont malheureusement arrivés et maintenant les
cimes sont par terre, comme le reste du projet, juste à temps pour éviter une nouvelle catastrophe
financière, à l’image du restaurant du Saut de Gouloux (onéreusement financé par le département,
puis en faillite, puis racheté par le frère du Président du Conseil Départemental puis vendu à
nouveau).
Cet exemple de projet de Tour belvédère du Haut Folin est une bonne synthèse : Imaginons qu’avec
ce même budget, on restaure quelques dizaines de kilomètres de chemins ruraux du département
pour les dédier entièrement aux vélos et piétons afin de relier des bourgs, des sites touristiques, en
dehors du réseau routier nivernais assez peu adaptés aux nuées de citadins en vélos. On gagnerait
sur tous les plans : la sécurité, le confort, l’aspect bucolique et des aménagements profitables à un
plus grand nombres de communes (évitant de toujours favoriser les mêmes…). On pourrait même en
faire un argument touristique, assez singulier en France.


Cette redéfinition claire de notre cible touristique, sans œillère idéologique, apportera forcément les
bonnes solutions.
La Nièvre, certainement pour des raisons politiques et géographique, recèle de
plusieurs centres de vacances datant de plus d’un demi-siècle, qui étaient des propriétés publiques
ou semi publiques appartenant à de grandes agglomérations ou à des entreprises publiques (EDF,
RATP, etc…). Plusieurs de ces centres sont aujourd’hui en mauvais état ou à l’abandon, plusieurs ont
été mis en vente malgré d’onéreux travaux dans un passé assez récent (par exemple le fameux
centre de vacances de Saint-Agnan). Il est évident qu’il faut absolument tourner cette page, car tant
d’un point de vue budgétaire que stratégique, le financement par le contribuable des vacances de la
jeunesse des banlieues parisiennes dans notre département n’apparait pas comme vital pour la
filière touristique locale.
Enfin, il faut un réel accent sur la politique de création et rénovation de gîte, qui ne peut que profiter
directement aux nivernais, permettant au passage de financer la rénovation de nos vieilles bâtisses,
bien souvent en attente d’un petit coup de fraicheur. Selon les finances publiques, la relance d’un
plan départemental de subvention aux travaux serait appréciable, sinon à minima une simple vision
stratégique claire et réaliste de notre secteur touristique suffirait à soutenir efficacement la filière. Et
évidement, les deux en même temps, serait encore mieux ! Cela commence par des choses simples
et peu onéreuses :

  • L’aménagement et la propreté de sites touristiques (souvent sous l’autorité des
    Communauté de Commune), en prenant pour exemple les manquements estivaux sur les
    abords du lac des Settons (amoncellement de déchets, problèmes de stationnement,
    signalétique, etc).
  • Le recours au personnel dans les Offices du Tourisme maîtrisant à minima une langue
    étrangère européenne,
    ce qui signifie sortir de la spirale de l’emploi aidé et des contrats
    courts.
    De façon générale, il faut faire primer le bon sens et faire cesser tous ces projets de musées aux prix
    exorbitants, aux thématiques mal définies ou dont on sait pertinemment qu’ils n’attireront jamais les
    foules (par exemple la Cité Muséale de Château Chinon). Car trop souvent, ces projets servent plutôt
    à flatter des égos d’élus, plus soucieux d’une belle photo d’inauguration et de l’utilisation de crédits
    alloués durant leur mandat que de la viabilité réelle du projet. Et pendant ce temps, des joyaux du
    département somnolent, tels que les superbes hôtels de Saint Honoré les Bains…

Il n’y a pas besoin de « Disneylandiser » la Nièvre avec des centres d’attractions divers et variés,
notre atout touristique c’est justement ce calme, cette verdure, cette image d’une France rurale qui
ressemble encore à la France rurale millénaire
. Ici, le touriste préfère une balade en VTT à un
divertissement culturel connecté réalisé dans bâtiment « design ». Et ceux qui jugent que la Nièvre
c’est vieillot, ils ont un large choix de destinations en France pour trouver des endroits plus
urbanisés. Dans un panel d’offres, vaut-il mieux se standardiser et lutter en concurrence avec la Cote
d’Azur ou se différencier et jouer ses propres atouts pour le créneau d’un tourisme moderne, vert,
attirant principalement des amoureux de la France?

Harold BLANOT

One thought on “La Nièvre, un potentiel touristique encore sous-exploité”

  1. Cher Monsieur, vous mettez l’accent sur un point crucial de ce département. La Nièvre a peu d’atout à court terme pour développer son économie et le tourisme vert en effet en est un. J’ai travaillé un peu sur le sujet en raison des élections municipales de 2020 à La Charité pour lesquelles je fus pendant 5 mois directeur de campagne d’un candidat opposant. J’avais réussi à obtenir un document de travail élaboré par la présidence Gorce du Pays de je ne sais plus quoi, intégrant la commune de La Charité. Les bras n’en étaient tombés au vu du nombre d’acteurs et au vu de la banalité des analyses et actions déduites. J’avais noté et je le constate encore qu’il y a, et j’ose le dire, un double problème dans ce département. Le premier c’est un manque notoire de compétences. Le deuxième c’est une situation politique issue de cooptations, de copinages et d’intérêts particuliers en tous genres, et ce depuis des décennies qui élection après élection du niveau national au niveau communal génère un entre-soi et une gestion autarcique de ces clans ainsi formés. Il y en a même un troisième qui est l’aberration de passer commande à des cabinets ou des experts issus naturellement de relations particulières très bien payés et qui continuellement fournissent des rapports restant au fond des tiroirs et le plus souvent pas à la hauteur des attentes. Votre proposition de développer des pistes de village en village et de lancer un programme de rénovation du patrimoine existant est assurément une excellente perspective. Faudrait-il passer par le privé pour contourner ces élus actuels incapables de diriger ce département vers un futur engageant ?

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